Livestock Research for Rural Development 26 (11) 2014 | Guide for preparation of papers | LRRD Newsletter | Citation of this paper |
L’état des parcours steppiques de la région de M’Sila traverse de profondes évolutions que nous avons étudiées en nous intéressant à la caractérisation et la forte transition des systèmes d'élevage moutonniers de cette région. Nous avons mené des entretiens auprès de 30 éleveurs, répartis sur 11 zones potentiellement pastorales de la steppe algérienne (pluviométrie entre 100 et 400 mm/an) autour de M’Sila.
Les systèmes d’exploitation des parcours sont le système pastoral (13,3%), en régression, et le système agro-pastoral (86,7%) qui augmente avec les défrichements. Les déplacements pour l’été en mauvaise année peuvent être importants. Tous les éleveurs ont recours à une complémentation alimentaire, économiquement rentable. Cette situation induit une rapide dégradation des sols qui se traduit par une désertification du milieu (64,5 % des sols sont très dégradés pour seulement 17,6% corrects). Par ailleurs, les cheptels continuent à augmenter. En conséquence, les pâturages (parcours naturels et vaine pâture) se trouvent chroniquement en état de surcharge, parfois toute l’année. Devant cette situation préoccupante, de nouvelles stratégies à envisager devraient s’appuyer à la fois sur des réhabilitations (régénération naturelle ou plantation pastorale) et sur des systèmes alternatifs d’associations élevage – agriculture (avec les périmètres agricoles).
Mots clés: agropastoralisme, elevage, ovin, steppe
The condition of steppic rangelands of the area of M'Sila is undergoing through profound changes that we have studied by focusing on the characterization and the high transition of this region sheep livestock systems. We conducted interviews with 30 farmers, spread over 11 potentially pastoral areas of the Algerian steppe (rainfall between 100 and 400 mm / year) around M'Sila.
The operational systems of rangelands are the pastoral system (13.3%), depleted, and the agro-pastoral system (86.7%) which increases with clearings. Travel for the summer in a bad year can be significant. All breeders use a food supplementation, economically profitable. This induces a rapid degradation of the soil resulting in desertification of the environment (64.5% of soils are degraded to only 17.6% correct). Furthermore, livestocks keep increasing. Consequently, pastures (rangelands and common grazing) are chronically overload, sometimes all the year. Given this worrisome situation, new strategies to be considered should be based on both rehabilitations (natural regeneration or pastoral plantation) and on alternative systems of associations of breading-farming (with agricultural perimeters).
Key words: agropastoralism, livestock, sheep, steppe
La steppe algérienne est une vaste région allant de l’Atlas Tellien au nord jusqu'à l’Atlas Saharien au sud (30 millions d’ha soit 12,6 % du territoire Algérien). Elle était détentrice d’importants savoirs et traditions en matière d’élevage pastoral. La végétation naturelle des parcours de ce très vaste espace est constituée principalement par des steppes à base d’alfa (Stipa tenacissima), d’armoise blanche (Artemisia herba alba), de sparte (Lygeum spartum) et des steppes à base de remt (Arthrophytum scoparium). Aïdoud et al (2006) situent les limites de la steppe en s’appuyant sur les critères pluviométriques entre 100 et 400 mm de pluviométrie (Figure 1).
Figure 1. La steppe Algérienne |
Les activités d’élevage sont marquées par la mobilité des troupeaux ovins et des hommes au sein de vastes parcours à usage collectif constituant un écosystème fragile où évoluaient des populations pastorales. Ces dernières subsistent par l’exploitation des ressources naturelles de ces parcours (Bourbouze 2000). C'est précisément là que les ressources pastorales constituent la principale source de revenu pour 3,6 millions d’habitants (Bensouiah 2003).
L’équilibre de cet écosystème s’avère actuellement compromis suite à des modes de gestion des ressources pastorales qui ont du mal à s’adapter à de multiples changements (socio-politique, comme le foncier ; culturel, comme le changement d’habitat, la scolarisation des enfants… ; l’emprise des cultures, les aléas climatiques, etc.). Pour certains, ce processus de dégradation et de désertification des parcours semble irréversible (Bedrani 1995).
En Algérie, comme dans les autres pays du Maghreb, la dégradation de la végétation pastorale et des sols des zones steppiques atteint des stades très préoccupants (Aïdoud et al 2006 ; Köchy et al 2008).
La région de M’sila a été retenue car elle présentait plusieurs éléments importants pour notre étude :
- la vocation pastorale de la région de M’sila est très ancienne où l’activité d’élevage est toujours source de revenu d’une grande partie de la population locale ;
- un vaste espace pastoral, à hauteur de plus d'un million d’hectares ;
- la localisation de la région qui est considérée comme une zone de transition entre le territoire saharien et la steppe proprement dite (d’où une sensibilité aux évolutions climatiques).
Pour une meilleure représentativité de l'ensemble, l'étude proprement dite a porté sur les zones de Magra, Khoubana, Boussaâda, Djebel M'saad, Mohamed Boudiaf, Sidi Ameur, Ain El Melh, Bir Fodda, Sidi M'hamed, Ain Farés et Ain Riche.
Par ailleurs, la plus grande partie de notre échantillon se situe au sud et au centre de la wilaya où se combinent deux paramètres : parcours à alfa ( Stipa tenacissima) (20% de la superficie totale de la wilaya) et importance des effectifs ovins existants. (Figure 2).
Figure 2. Situation des zones d’étude. |
Des entretiens semi-directifs ont été entrepris auprès de 30 éleveurs, répartis à travers les 11 zones retenues pour l'étude représentant par là même différents systèmes d'élevage et ce, afin de saisir une diversité en matière de conduite et de pratiques d’élevage. Le tableau n°1 récapitule l'échantillon approché. Par ailleurs, le recours au Haut Commissariat de Développement de la Steppe (HCDS) était la source d'informations ayant trait au milieu steppe dans sa globalité.
Tableau 1. Récapitulatif de l'échantillonnage | |||
Zones |
Nombre d'éleveurs approchés |
|
% par rapport au total |
Magra |
2 |
|
6,7 |
Khoubana |
4 |
13,3 |
|
Boussaâda |
3 |
10,0 |
|
Djebel M'saad |
4 |
13,3 |
|
Mohamed Boudief |
1 |
3,3 |
|
Sidi Ameur |
2 |
6,7 |
|
Ain El Melh |
2 |
6,7 |
|
Bir Fodda |
3 |
10,0 |
|
Sidi M'hamed |
6 |
20,0 |
|
Ain Farés |
1 |
3,3 |
|
Ain Riche |
2 |
6,7 |
|
Total |
30 |
|
100 |
Les investigations de terrain révèlent l'existence de deux grands systèmes d’élevage pratiqués : un système pastoral et un autre agro-pastoral.
Ce système autrefois généralisé, ne concerne aujourd'hui que 13,3% des éleveurs approchés. Ce type d’élevage fait appel quasi exclusivement aux parcours naturels pour satisfaire les besoins nutritifs du troupeau, ce qui suppose des déplacements dont l’amplitude est fonction des moyens dont dispose l’éleveur, mais aussi fonction de l'année (favorable ou défavorable). En bonne année, les éleveurs profitent des pâturages de proximité (parcours et chaumes). Cependant, en mauvaise année, les éleveurs sont obligés d’avoir recours aux zones lointaines pour chercher de quoi nourrir les animaux ; c'est de l'Achaba qu'il s'agit. Cette dernière consiste à remonter les troupeaux dans les zones telliennes, vers un pacage valorisant les sous-produits de l’agriculture, sur les chaumes et les pailles des terres céréalières pendant les 3 à 4 mois de l’été. Les grands déplacements des confins présahariens aux zones céréalières du Tell restent le privilège des gros éleveurs auxquels ne font défaut ni les moyens financiers ni les moyens matériels. (Figure 3).
Figure 3. Flux migratoires des éleveurs de la région de M’Sila. |
Par ailleurs les petits éleveurs, dont les troupeaux sont de petite taille, font paître les animaux sur les parcours à longueur de l'année, et au quotidien du matin au soir. La distance parcourue quotidiennement par les troupeaux ne dépasse pas les 15 km (transhumance à rayon limité). En effet, les éleveurs utilisent d’abord les parcours qui se trouvent à proximité de leur lieu de résidence ou bien aux alentours des points d’abreuvements.
En complément à l’élevage, une large proportion d’éleveurs, 86,7%, s'adonnent au travail de la terre. Outre la jouissance des animaux par le fourrage gratuit des parcours steppiques (en diminution continue), les céréales produites localement ou achetées (orge, maïs, son, paille, foin) complètent le manque de fourrage sur parcours.
En effet, les systèmes d’élevage moutonniers actuels sont caractérisés par une sédentarisation des familles des éleveurs, ce qui conduit évidemment à une transformation de la conduite alimentaire des troupeaux. Deux traits fondamentaux les caractérisent :
Il s'agit d'une quasi généralisation de la complémentation sur parcours. A dire d'éleveurs, les défrichements ainsi que la mise en culture s’inscrivent dans une stratégie à l'égard des conditions du milieu. Faire ses propres céréales, pâturer ses chaumes en été et constituer ses propres stocks de paille présentent beaucoup d’attraits pour les éleveurs.
Il s'agit d'une généralisation de la complémentation sur parcours. Le début d’utilisation de la complémentation alimentaire par des aliments concentrés remonte aux années 1970 où l’Etat avait accordé une subvention à l’aliment concentré importé. A l’époque le but était de combler le déficit fourrager naturel disponible pendant les périodes de sécheresse. Depuis cette période, en milieu steppique la lutte contre les aléas climatiques ne se fait que par le recours systématique à la complémentation par des aliments concentrés produits sur place ou le plus souvent achetés. Cette pratique s’est étendue à tous les éleveurs. A titre d’exemple dans notre échantillon d’étude, tous les éleveurs pratiquent la complémentation. En d'autres termes, on peut parler désormais d'une Achaba inversée.
Selon Bourbouze (2000), le maintien de la complémentation alimentaire par des aliments concentrés malgré les prix élevés des céréales sur le marché international, ce maintien est dû au rapport du prix du kg d’agneau vif / kg d’orge. Ce rapport étant supérieur à 25 du fait du prix élevé de la viande, c'est ainsi qu’il ne faut que 10 kg d’orge pour faire 1 kg de croît au niveau d’un troupeau. Donc, le prix de la viande est de l’ordre de 2,5 fois le prix de l’orge nécessaire pour produire cette viande. La complémentation est donc toujours rentable.
Il est certain qu'il n'est pas souhaitable de nourrir les ovins exclusivement à base du concentré, il serait opportun de leur administrer une ration de base et des aliments de lest, fournis par les pâturages.
L’analyse ayant trait aux potentialités pastorales fait ressortir que les parcours s’étendant sur une superficie de 839 212 ha sont dans un état dégradé (soit 73,45%). Les parcours dont l’état est avéré correct occupent seulement une superficie de 201 265 ha, et ne représentent que 17,62% de la superficie totale (Tableau 2).
Tableau 2. Etat des parcours de la wilaya de M’Sila. (H.C.D.S. 2010) |
||
Etat |
Superficie (ha) |
% |
Satisfaisant |
0 |
0 |
Correct |
201 265 |
17,6 |
Moyen |
102 020 |
8,93 |
Dégradé |
102 799 |
9,00 |
Très dégradé |
736 413 |
64,5 |
Total |
839212 |
100 |
Les principales causes qui ont concouru à la dégradation des parcours de la région d’étude se résument essentiellement dans les points suivants :
Les surcharges de longue durée dans les parcours (parfois il s’agit de pâture continue toute l’année) gênent le renouvellement du couvert fourrager des parcours steppiques. Ces pâtures de longues durées souvent conjointes à de fortes charges animales compromettent le renouvellement de la végétation. Cette situation est fortement ressentie aux alentours des points d'abreuvement essentiellement fréquentés par les petits éleveurs.
Les espèces les plus appétées sont celles qui disparaissent en premier. Les aléas climatiques intra et interannuelles ne font qu’accentuer la situation. Ce constat a mené de nombreux spécialistes à tirer la sonnette d’alarme ; Le Houerrou (1969), Djebaïli (1978) et Floret et Pontannier (1982) qui s’accordent tous à dire que les surfaces pastorales et surtout leurs potentiels écologiques notamment de production ont régressé de manière spectaculaire. C’est ainsi que la végétation steppique a fini par être altérée ; elle ne fournit plus que 64 U.F./an. Depuis 1985, sa capacité de charge a baissé de moitié en passant de 0,18 à 0,09 équivalent brebis/ha. Il faut désormais 11 ha de steppe pour assurer les besoins d’un équivalent brebis (Boutonnet 1989 cité par Dine 2002). La steppe serait donc en situation de surcharge avec un rapport de 1,3 ovin par ha palatable en 2000, contre 0,8 seulement en 1985. Mais que déduire lorsqu’on sait qu'en 1985 il était déjà dit que la steppe ne pouvait supporter que le quart du troupeau existant à l’époque ? Le maintien d’un effectif aussi important par rapport aux disponibilités fourragères a été encouragé durant plusieurs années par l’importation des aliments concentrés subventionnés par l’Etat (orge et maïs). A l'état actuel, ces aliments subventionnés ou non sont largement utilisés.
En effet, dans la région d’étude, la charge potentielle des parcours est de 5,65 ha/tête. Néanmoins, la charge effective est de l’ordre de 0,71 ha/tête, c'est-à-dire que le cheptel existant est huit fois plus supérieur à ce que peuvent supporter les parcours de la région de M'sila.
Le terrain est révélateur d’une situation fort contraignante, c'est dans ce sens que Brouri (2011) rapporte que 51 % de la superficie des parcours ont une capacité de charge supérieure à 6 ha /tête. La charge animale moyenne est de 5, 65 ha/ tête (Tableau 3).
Tableau 3. Répartition des parcours en fonction de leur capacité de charge (HCDS 2010) | |||||
Classes de charge |
Superficie (ha) |
% |
Charge totale |
% |
Charge moyenne |
[0-4 ha/tête] |
2 354 746, 45 |
10, 86 |
685 679, 64 |
17, 88 |
03, 46 |
[4-6 ha/tête] |
8 104 144, 80 |
37, 38 |
1 902 153, 35 |
49, 57 |
04, 28 |
[6-8 ha/tête] |
1 457 711, 09 |
06, 73 |
214 210, 34 |
05, 58 |
06, 85 |
[8-10/tête] |
8 219 157, 41 |
37, 91 |
986 897, 15 |
25, 72 |
08, 33 |
>10 ha/tête |
1 542 439, 38 |
07, 12 |
47 853, 74 |
01, 25 |
34, 88 |
Global |
21 678 199, 13 |
100 |
3 836 794, 22 |
100 |
05, 65 |
Le tableau 3 nous renseigne qu'en l'état actuel des choses, les parcours steppiques ne peuvent contribuer qu’ à alimentation de 3,8 millions équivalents têtes, sans tenir compte des compléments.
b- Le défrichage
Le défrichage des parcours pour mise en culture de céréales (avoine, orge et blé) est une autre cause majeure qui altère les parcours en réduisant leurs surfaces. Le défrichement est l'un des indicateurs de la dégradation des ressources végétales. Ces dernières se manifestent surtout à travers la diminution du taux de recouvrement et le changement du cortège floristique. Les faciès que l’on retrouve sont modifiés tant sur le plan de la densité du couvert végétal que sur le plan de leur valeur pastorale.
La gratuité des unités fourragères prélevées sur les parcours pousse les gros possédants à accroître la taille de leurs troupeaux et les conduit à défricher davantage les parcours. De plus, sur le plan social, le défrichage est pratiqué par des personnes qui veulent marquer leur droit d’utilisation sur des terrains récemment acquis.
Il y a lieu par ailleurs de signaler que les causes de dégradation des parcours sont le fruit de plusieurs facteurs qui agissent par des effets conjugués. Dans ce sens, on peut noter que la faiblesse d’offre d’emploi hors agricole pousse la population de plus en plus agrandie à défricher des morceaux de terre et élever quelques têtes de moutons pour satisfaire ses besoins.
L’élaboration d’une stratégie d’exploitation et de gestion des parcours steppiques doit s'inscrire dans une stratégie de développement agropastoral intégré qui doit à son tour améliorer les deux secteurs ; agricole et pastoral. Pour cela, cette stratégie doit se greffer sur une gestion patrimoniale pour faire une affectation équitable des espaces entre l’agriculture et le pâturage selon leurs potentialités (Senoussi et al 2011).
C’est dans ce sens qu’on recommande une démarche qui tienne compte de trois principaux scénarios d’aménagement et de gestion et se résume principalement en :
Contrairement à la mise en défens, la technique de la régénération naturelle assistée peut être employée pour une reconstitution rapide de la végétation. C'est un scénario qui veut une accélération du processus de régénération en agissant sur la surface du sol par un labour en courbes de niveaux qui augmentera sa rugosité et favorise par la même le piégeage des grains et des débris organiques, et les eaux de ruissellement.
La conjugaison entre la régénération naturelle et la mise en défens est la technique la mieux indiquée pour induire la remontée biologique de la végétation naturelle des parcours dégradés. Dans la région d’étude, cette technique peut être appliquée sur les 102 020 ha de parcours moyennement dégradés afin de les récupérer avant que qu'ils ne soient dégradés davantage. Cependant, la superficie mise en défens dans la région jusqu’à présent reste très faible, ce qui nécessite plus d’interventions sur le reste des superficies non encore aménagées.
Cette technique est très intéressante pour la valorisation des espaces très dégradés où le couvert végétal ne peut pas se régénérer par la mise en défens ou par la régénération naturelle. Plusieurs espèces autochtones et exotiques ont été utilisées en plantation, parmi lesquelles on peut citer celles ayant déjà donné des résultats encourageants, à l'image des atriplex (Atriplex canescens, Atriplex halimus, Atriplex nummilaria) et des luzernes ( Medicago arboria, Medicago sativa).
Les principaux impacts de la plantation pastorale concernent l’amélioration de la production fourragère de 30 - 50 UF/ha à plus de 600 UF/ha, ce qui offre une véritable opportunité aux troupeaux, ainsi qu’une bonne valorisation des espaces dégradés même ceux les plus improductifs, tels que les zones dunaires, salées, hamada et terrains accidentés. Un autre impact est la protection des sols contre les effets de l'érosion (Brouri 2011).
La plantation pastorale peut être pratiquée à travers les 839 212 ha de parcours dégradés dans la région de M’sila. Elle permettrait de restaurer en grande partie la capacité de production perdue, comme le montrent les photos 1 et 2.
Photo 1. Développement de l’Atriplex dans une réserve à M’Sila. | Photo 2. Développement de la végétation spontanée dans une réserve à M’Sila. |
Les voies de développement dans ce sens peuvent s'articuler autour de l’intensification de la production fourragère et la valorisation des produits et sous-produits agricoles.
Actuellement les cultures fourragères utilisées sont essentiellement des graminées (orge, avoine, sorgo) consommées en vert ou en sec. De cette façon, ces fourrages ne répondent pas exactement aux besoins des animaux, car, non seulement ils sont insuffisants en superficie et en quantité, mais aussi ils ne sont pas équilibrés du fait qu’ils sont riches en énergie, mais pauvres en matière azotée. Par contre, il existe des espèces fourragères à promouvoir dans la région telles que les luzernes (Medicago sativa, Medicago falcata). Ces espèces peuvent être utilisées en assemblage avec les fourrages existants déjà pour permettre de compenser le manque en matière azotée.
Par ailleurs, pour parer à l’insuffisance et l’irrégularité des précipitations que connaît la région, la maîtrise des techniques d’irrigation modernes et la domestication des eaux de crue par la déviation, l’acheminement et la dispersion sont nécessaires. La région de M'sila recèle un potentiel important en eaux superficielles (320 millions m3/an) constituées essentiellement par des eaux de ruissellement des pluies, outre un potentiel considérable en eaux souterraines. Ces dernières, considérées comme une ressource non renouvelable, doivent être utilisées avec précaution à travers le développement de systèmes économiseurs d’eau (irrigation localisée).
Alors que la valorisation de certains produits et sous-produits agricoles s’avère primordiale, la paille, le sous-produit le plus rencontré dans la région, mérite d’être bien valorisée. La technique de traitement de la paille à l’urée a prouvé une amélioration notable de la valeur alimentaire de la paille : augmentation en UF et supplémentation en matière azotée. Dans les conditions algériennes de conditionnement des fourrages, une paille traitée à l’urée a une valeur alimentaire (0,42 UF/kg) avoisinante de celle du foin d’avoine, fourrage le plus cultivé dans la région. Le traitement à l’urée permet d’améliorer la valeur alimentaire de la paille de 27%. Donc, leur contribution s’améliorera de 2 772 000 UF en plus, soit l’équivalent des besoins de 6 930 têtes ovines.
L’analyse des systèmes d'élevage existants dans la région de M’sila révèle qu’il s'agit plutôt de systèmes agropastoraux que de systèmes pastoraux proprement dits, et ce, au regard du passage d’un mode pastoral à un mode agropastoral.
Nombreux sont les facteurs qui ont influé négativement sur les espaces pastoraux : l’emprise des cultures ; le changement des modes de conduite des animaux : l’augmentation d’un cheptel qui est déjà supérieur à la capacité d’accueil des parcours actuels. D’où un recours récurrent à la complémentation alimentaire. De cette situation, il résulte une diminution du couvert végétal pérenne.
Compte-tenu de la dépendance des systèmes d’élevage en grains et compléments pour l’alimentation des animaux, il devient pertinent pour la recherche d’étudier quelles peuvent être les voies de restauration et réhabilitions des parcours.Les actions de réhabilitation devraient s’articuler autour de la remise en état du couvert végétal, à des fins fourragères tout en apportant des améliorations appréciables sur la biodiversité et la résistance des sols. La technique de régénération naturelle et les plantations pastorales peuvent constituer des moyens efficaces. Cependant, ces actions doivent être accompagnées de mesures foncières en tenant compte des populations, de leur mode d’organisation.
Des réflexions conjointes pourraient être abordées sur l’association de l’élevage et de l’agriculture à travers l’intensification des cultures fourragères et la valorisation des sous-produits agricoles.
En somme, la réussite des projets d’aménagement sous entend l’implication de tous les acteurs intervenant en milieu pastoral. L’aménagement agropastoral ne sera pas durable, s’il n’est pas inscrit dans un cadre de développement qui touche l’ensemble des activités économiques de la région qui soit en dialogue avec des opérations de recherches participatives. Le processus de développement n'est-il pas une action intégrative ?
Aïdoud A, Le Floc'h E et Le Houérou H N 2006 Les steppes arides du nord de l’Afrique. Sécheresse 2006 ; 17 (1-2) : 19-30. http://www.jle.com/e-docs/00/04/1F/03/vers_alt/VersionPDF.pdf
Bedrani S 1995 Une stratégie pour le développement des parcours en zones arides et semi-arides. Ed. Rapp. Techn. (Algérie). 61 p.
Bensouiah R 2003 La lutte contre la désertification dans la steppe algérienne : les raisons de l’échec de la politique environnementale, In 15èmes journées de la Société d’Ecologie Humaine, 11-12 déc. 2003, Marseille. Du Nord au Sud : le recours à l’environnement, le retour des paysans ? http://www.afpf-asso.org/index/action/page/id/33/title/Les-articles/article/1477
Bourbouze A 2000 Pastoralisme au Maghreb : la révolution silencieuse. CIHEAM / IAM (Montpellier). 2000. 19 p. http://www.afpf-asso.org/index/action/page/id/33/title/Les-articles/article/1477
Brouri L 2011 Impacts des changements climatiques sur la gestion durable des ressources pastorales et des parcours dans les zones arides et semi-arides de l’Algérie, in Atelier Sous-Régional sur l’effet du changement climatique sur l’élevage et la gestion durable des parcours dans les zones arides et semi-arides du Maghreb ; Ouargla-Algérie, du 21 au 24 Novembre 2011. p.p.29-38.
Dine N 2002 Le Système d’élevage ovin en milieu steppique : pour une exploitation rationnelle des potentialités locales - cas de la commune de Tadjmout, Wilaya de Laghouat - ; Mémoire d’Ingénieur Agronome, Département des Sciences Agronomiques, Faculté des Sciences et Sciences de l’Ingénieur, Université de Ouargla. Algérie. 148 p.
Djebaïli S 1978 Recherche phytosociologique et écologique sur la végétation des hautes plaines steppiques et de l’Atlas saharien algérien. Thèse de Doct., Univ. Sci. Tech. Languedoc, Montpelier (France), 299 p.
Floret C et Pontannier R 1982 L’aridité en Tunisie présaharienne. Travaux et doc OROSOM ; Thèse de Doctorat, Université des Sciences et de la Technologie, Montpellier (France), 544 p.
HCDS 2010 Haut Commissariat de Développement de la steppe. Rapport d'action. Doc. Ronéotypé, 36 p.
Köchy M, Mathaj M, Jeltsch F and Malkinson D 2008 Resilience of stocking capacity to changing climate in arid to Mediterranean landscapes. Reg Environ Change (2008) 8:73–87 http://opus.kobv.de/ubp/volltexte/2008/1872/pdf/koechy_etal_2008.pdf?origin=publication_detail
Le Houerrou H N 1969 Végétation de la Tunisie steppique (avec références aux végétations analogiques d’Algérie, Libye et Maroc) ; I.N.R.A. Tunisie, 624 p.
Senoussi A, Chehma A et Bensemaoune Y 2011 La steppe algérienne à l’aube du IIIème millénaire : quel devenir ? Annales des sciences et Technologie ; 2011 ; 3 (2) : 129-138. http://revues.univ-ouargla.dz/images/banners/ASTimages/ASTDOC/ASTV3N2/A030206.pdf
Received 23 June 2014; Accepted 17 October 2014; Published 3 November 2014