Livestock Research for Rural Development 20 (12) 2008 | Guide for preparation of papers | LRRD News | Citation of this paper |
Les feuilles de 30 espèces végétales sauvages ont été proposées individuellement à l’escargot Limicolaria flammea (Müller 1774) en laboratoire. Les six fourrages verts les plus appréciés ont ensuite été proposés en binômes aux escargots au cours d’une expérience de préférence alimentaire. Leur composition biochimique a été déterminée.
Limicolaria flammea (Müller) consomme une gamme très variée de plantes sauvages, mais préfère Sterculia tragacantha (Sterculiaceae) et Cassia siamea (Caesalpiniaceae).
Mots-clés: Cassia siamea, choix alimentaire, comportement alimentaire, croissance, Sterculia tragacantha
The leaves of 30 species of wild vegetables were separately proposed to the snail Limicolaria flammea (Müller) in laboratory. The six green fodders most appreciated were then proposed pairwise to the snails during a dietary preference experiment. Their biochemical components were determined.
Limicolaria flammea (Müller) consumes miscellaneouse wild plants but prefers Sterculia tragacantha (Sterculiaceae) and Cassia siamea (Caesalpiniaceae).
Key words: alimentary behaviour, alimentary choice, Cassia siamea, growth, Sterculia tragacantha
Le régime alimentaire d’un animal, du point de vue qualitatif et quantitatif est d’une importance fondamentale en biologie et en écologie (Otchoumou et al 2005 a). Les escargots géants d’Afrique sont essentiellement végétariens, bien que des cas de cannibalisme sur des sujets moribonds soient connus (Hardouin et al 1995). Ils choisissent leurs nourritures parmi une gamme variée de plantes disponibles et s’intéressent aussi bien aux racines, aux fruits qu’aux feuilles. Toutefois, le choix alimentaire qu’ils opèrent a une incidence sur le végétal entraînant une perturbation de son développement (Cates et Orians 1975; Lubchenco 1978; Nicotri 1980). Pour s’assurer de l’efficience de l’aliment, il est indispensable d’identifier au préalable les végétaux naturellement consommés par l’escargot choisi pour l’élevage, car certaines espèces végétales se sont déjà révélées toxiques (Hardouin et al 1995). De nombreux travaux ont montré que certains Gastéropodes terrestres, dans leur quête de nourriture, peuvent parcourir de longues distances sur un terrain leur offrant peu d’aliments (Moens 1965) de même que sur une aire riche en végétaux comme s’il s’agissait alors d’identifier ces plantes afin d’effectuer un choix.
Dans le présent travail, nous avons comme objectif de faire un inventaire alimentaire et de rechercher les préférences de Limicolaria flammea (Müller) parmi 30 espèces végétales sauvages.
Les escargots ont été collectés dans les jachères, sur le site de l’Université d’Abobo-Adjamé (Côte d’Ivoire). Il s’agit d’individus de 32,5 mm de longueur moyenne de coquille et de poids vifs moyen de 3,20 g.
Les feuilles de 30 espèces végétales cultivées dans la forêt de l’Université d’Abobo-Adjamé ont servi d’aliment dans ce travail. Cette forêt se caractérise par une forte pluviométrie (presque 2000 mm de pluie/an), une température moyenne de 26 ˚C et une humidité relative de l’air d’environ 90%. Elle couvre une superficie d’environ 5 ha.
Les expériences d’inventaire alimentaire ont nécessité la sélection de 12 escargots répartis dans trois bacs à raison de quatre individus par bac. Chaque expérience est répétée trois fois. Les bacs d’élevage en plastique, à base carrée de 0,205 m de côté avec une hauteur de 0,14 m ont une surface de base de 0,042 m2 et un volume de 0,0086 m3. Ces bacs sont perforés à la base et sur les côtés pour faciliter la circulation de l’air. Un dispositif anti-fuite constitué par le couvercle également en plastique et perforé, adhère au pourtour du bac à la manière d’un bouton pression. L’intérieur des bacs est recouvert d’une litière constituée par une portion de sol d’une hauteur de 4 cm, préalablement stérilisée par chauffage à l’étuve de marque P. Selecta à 60ºC pendant 3 heures. Les animaux ont été mis en observation pendant une semaine dans des bacs similaires pour les habituer à la vie en captivité. L’expérience consiste à mettre les escargots à jeûn durant deux jours, puis à leur proposer un aliment constitué de feuilles d’une espèce végétale pendant 15 jours à raison de 60 g par bac. Un bac témoin avec la même quantité de végétal, placé dans les mêmes conditions expérimentales, permet de faire les corrections de poids dues à la dessication du matériel végétal. Tous les 15 jours, les escargots et l’aliment sont nettoyés et pesés à l’aide d’une balance électronique de marque Sartorius, de précision 0,01 g. Un arrosage régulier est effectué dans chaque bac afin de maintenir une humidité convenable de la litière. Pour déterminer la préférence alimentaire, les six plantes les plus consommées ont été proposées aux escargots par paire à raison de 30 g par plante. L’expérience se déroule dans les mêmes conditions que précédemment avec l’utilisation du même nombre de bacs et de lots d’escargots. La composition biochimique de ces végétaux a été déterminée afin de mieux comprendre le préférendum des animaux.
L’inventaire et la préférence alimentaires sont estimés à partir de la quantité de végétaux verts quotidiennement consommée et du taux moyen journalier de consommation. Le choix d’un végétal ou d’une combinaison de végétaux comme meilleur aliment tiendra compte non seulement de la quantité de végétaux quotidiennement consommés, mais aussi de l’indice de transformation qui est la quantité du végétal qu’il faut pour produire un kilogramme d’escargot.
Les végétaux proposés à l’escargot Limicolaria flammea (Müller) ont tous été consommés (tableau 1).
Tableau 1. Inventaire de végétaux sauvages consommés par Limicolaria flammea (Müller 1774) |
||||
Espèces végétales |
IA, g/j/g |
TMJC, % |
REC |
IT |
Phaulopsis falcisepala (Acanthaceae) |
0,16 |
15,8 |
0,56 |
451 |
Gmelina arborea (Verbenaceae) |
0,03 |
2,85 |
0 |
- |
Acalypha hispidu (Euphorbiaceae) |
0,0004 |
0,04 |
0 |
- |
Sterculia tragacantha (Sterculiaceae) |
0,32 |
32,2 |
1,44 |
69,3 |
Amaranthus spinosus (Amaranthaceae) |
0,08 |
7,68 |
0 |
- |
Phyllanthus muellariam (Euphorbiaceae) |
0,03 |
2,81 |
0,44 |
228 |
Cananga odorata (Annonaceae) |
0,02 |
2,21 |
26,5 |
3,78 |
Laportea aestuans (Urticaceae) |
0,13 |
13,3 |
3,81 |
26,3 |
Secropia peltata (Moraceae) |
0,09 |
9,49 |
0,79 |
126 |
Cassia siamea (Caesalpiniaceae) |
0 ,26 |
25,7 |
1,26 |
79,1 |
Rauvolfia vomitoria (Apocynaceae) |
0,04 |
4,29 |
0 |
- |
Acalypha voikesiana (Euphorbiaceae) |
0,03 |
3,29 |
0 |
- |
Alternanthera sessilis (Amaranthaceae) |
0,04 |
3,94 |
0 |
- |
Lophira alata (Ochnaceae) |
0,02 |
2,48 |
0 |
- |
Heliotropum indicomun (Borajinaceae) |
0,01 |
1,37 |
0 |
- |
Chrysopogon citratus (Poaceae) |
0,09 |
8,87 |
20,9 |
4,79 |
Palisota hirsuta (Commelinaceae) |
0,10 |
10,4 |
1,95 |
51,3 |
Nephrolepis biserata (Oleandraceae) |
0,10 |
10,3 |
0,85 |
1178 |
Sarcophrynium brachystachys (Verbenaceae) |
0,06 |
6,33 |
0 |
- |
Croton lobatus (Euphorbiaceae) |
0,09 |
9,76 |
9,35 |
10,7 |
Alchornea cordifolia (Euphorbiaceae) |
0,02 |
1,79 |
0 |
- |
Sida acuita (Malvaceae) |
0,01 |
1,33 |
0 |
- |
Trichilia monadelpha (Meliaceae) |
0,04 |
4,09 |
0 |
- |
Solanum torvum (Solanaceae) |
0,10 |
10,3 |
0,11 |
936 |
Ficus benjamina (Moraceae) |
0,03 |
3,19 |
6,80 |
14,7 |
Clerodendrum paniculatum (Verbenaceae) |
0,11 |
10,6 |
4,69 |
21,3 |
Breyinia distica (Euphorbiaceae) |
0,01 |
1,07 |
0 |
- |
Aframomum sceptrum (Zingiberaceae) |
0,04 |
3,89 |
0 |
- |
Pueraria phaseloides (Fabaceae) |
0,02 |
2,40 |
0 |
- |
Trianthema portulacastrum (Ficoidaceae) |
0,01 |
0,97 |
0 |
- |
- IA: Ingestion alimentaire : IA (g/j/g de poids vif) = Q / Pm avec Q: quantité moyenne d’aliment vert quotidiennement consommé; Pm: poids moyen de l’escargot (g), sachant que: Q (g/j) = (qi - qf) / t avec qi: quantité initiale de végétaux (g); qf: quantité finale de végétaux (g); t: durée de la consommation en nombre de jour. - TMJC: Taux moyen journalier de consommation : TMJC (%) = (Qx100) / Pm avec Q: quantité moyenne de végétaux verts journellement consommée (g) ; Pm: poids moyen de l’escargot (g) - REC: Rendement écologique de croissance : REC = (ΔPx100) / Q avec ΔP: gain de poids (g) pendant l’intervalle de temps Δt ; Q: quantité d’aliment frais consommée (g) pendant l’intervalle de temps Δt - IT: Indice de transformation : IT =100 / REC |
Les plus appréciées sont les feuilles de Sterculia tragacantha et de Cassia siamea, tandis que les moins consommées sont les feuilles de Palisota hirsuta et de Clerodendrum paniculatum. L’aliment considéré comme meilleur pour la croissance et la reproduction de l’escargot est celui qui a le plus petit indice de transformation, car l’animal devra en consommer moins pour satisfaire ses besoins physiologiques. Au regard de cet indice, Canaga odorata et Chrysopogon citratus sont les meilleurs aliments. Il en faut respectivement 3,78 kg et 4,79 kg pour produire un kilogramme d’escargot, contrairement à Phaulopsis falcisepala et Solanum torvum pour lesquels il faut respectivement 451 kg et 935,60 kg pour produire un kilogramme d’escargot. Aussi, Cananga odorata et Chrysopogon citratus présentent-ils les meilleurs rendements écologiques de croissance.
Limicolaria flammea (Müller) marque sa préférence alimentaire par une consommation plus élevée du couple de végétaux préférés par rapport aux autres couples proposés (tableau 2).
Tableau 2. Plantes sauvages préférentiellement consommées par Limicolaria flammea (Müller 1774) (végétaux présentés par couple) |
|||||||
Paramètres calculés |
Consommation, g |
Niveau de préférence |
TMJC, |
REC |
IT |
||
Sous total |
Total |
Proportion, |
|||||
Phaulopsis falcisepala |
2,69 |
3,77 |
71,4 |
Phaulopsis falcisepala |
11,1 |
0,19 |
504 |
Sterculia tragacantha |
1,08 |
|
28,6 |
Sterculia tragacantha |
|
|
|
Phaulopsis falcisepala |
1,78 |
3,77 |
47,2 |
Phaulopsis falcisepala |
11,5 |
0,69 |
144 |
Laportea aestuans |
1,99 |
|
52,8 |
Laportea aestuans |
|
|
|
Phaulopsis falcisepala |
2,72 |
2,74 |
99,3 |
Phaulopsis falcisepala |
7,46 |
0,94 |
107 |
Cassia siamea |
0,02 |
|
0,73 |
Cassia siamea |
|
|
|
Phaulopsis falcisepala |
2,42 |
3,53 |
68,6 |
Phaulopsis falcisepala |
10,1 |
0,99 |
101 |
Palisota hirsuta |
1,11 |
|
31,4 |
Palisota hirsuta |
|
|
|
Phaulopsis falcisepala |
2,44 |
2,58 |
94,6 |
Phaulopsis falcisepala |
7,31 |
0,96 |
104 |
Clerodendrum paniculatum |
0,14 |
|
5,43 |
Clerodendrum paniculatum |
|
|
|
Sterculia tragacantha |
0,16 |
3,36 |
4,76 |
Laportea aestuans |
9,26 |
0,43 |
231 |
Laportea aestuans |
3,20 |
|
95,2 |
Sterculia tragacantha |
|
|
|
Sterculia tragacantha |
0,38 |
0,82 |
46,3 |
Sterculia tragacantha |
2,29 |
3,48 |
28,7 |
Cassia siamea |
0,44 |
|
53,7 |
Cassia siamea |
|
|
|
Sterculia tragacantha |
1,34 |
2,71 |
49,5 |
Palisota hirsuta » |
7,74 |
0,78 |
129 |
Palisota hirsuta |
1,37 |
|
50,6 |
Sterculia tragacantha |
|
|
|
Sterculia tragacantha |
1,12 |
1,45 |
77,2 |
Sterculia tragacantha |
4,02 |
1,24 |
80,4 |
Clerodendrum paniculatum |
0,33 |
|
22,8 |
Clerodendrum paniculatum |
|
|
|
Laportea aestuans |
1,59 |
1,65 |
96,4 |
Laportea aestuans |
4,79 |
0,83 |
120 |
Cassia siamea |
0,06 |
|
3,64 |
Cassia siamea |
|
|
|
Laportea aestuans |
1,61 |
2,65 |
60,8 |
Laportea aestuans |
6,70 |
0,59 |
168 |
Palisota hirsuta |
1,04 |
|
39,3 |
Palisota hirsuta |
|
|
|
Clerodendrum paniculatum |
0,38 |
2,20 |
17,3 |
Laportea aestuans |
5,14 |
0,97 |
103 |
Laportea aestuans |
1,82 |
|
82,7 |
Clerodendrum paniculatum |
|
|
|
Cassia siamea |
0,09 |
1,96 |
4,59 |
Palisota hirsuta |
5,19 |
0,58 |
173 |
Palisota hirsuta |
1,87 |
|
95,4 |
Cassia siamea |
|
|
|
Cassia siamea |
0,07 |
1,58 |
4,43 |
Clerodendrum paniculatum |
3,23 |
0 |
- |
Clerodendrum paniculatum |
1,51 |
|
95,6 |
Cassia siamea |
|
|
|
Palisota hirsuta |
1,07 |
1,57 |
68,2 |
Palisota hirsuta |
3,31 |
0 |
- |
Clerodendrum paniculatum |
0,50 |
|
31,9 |
Clerodendrum paniculatum |
|
|
|
TMJC: Taux moyen journalier de consommation REC: Rendement écologique de croissance IT: Indice de transformation |
L’analyse des quantités d’aliments consommés montre que cet escargot apprécie les binômes Phaulopsis falcisepala / Sterculia tragacantha et Phaulopsis falcisepala / Laportea aestuans, mais il consomme moins les binômes Sterculia tragacantha / Cassia siamea et Sterculia tragacantha / Clerodendrum paniculatum. Il exprime une préférence sensiblement égale vis à vis des binômes Phaulopsis falcisepala / Sterculia tragacantha et Phaulopsis falcisepala / Laportea aestuans, des binômes Phaulopsis falcisepala / Cassia siamea et Sterculia tragacantha / Palisota hirsuta, des binômes Phaulopsis falcisepala / Clerodendrum paniculatum et Laportea aestuans / Palisota Hirsuta et des binômes Cassia siamea / Clerodendrum paniculatum et Palisota hirsuta / Clerodendrum paniculatum. De même, à l’intérieur des différents couples d’aliments, le preferendum est exprimé par une consommation plus élevée de la plante préférée par rapport à l’autre plante du couple proposé. Cependant, l’on remarque une préférence sensiblement égale entre Phaulopsis falcisepala et Laportea aestuans, puis entre Sterculia tragacantha et Palisota hirsuta. A l’analyse des niveaux de préférence, Phaulopsis falcisepala apparaît comme un aliment de premier choix, ensuite viennent respectivement Laportea aestuans, Palisota hirsuta, Sterculia tragacantha, Clerodendrum paniculatum et Cassia siamea. Au regard de l’indice de transformation, les couples Sterculia tragacantha / Cassia siamea et Sterculia tragacantha / Clerodendrum paniculatum sont les meilleurs aliments. Il en faut respectivement 28,71 kg et 80,44 kg pour produire un kilogramme d’escargot, contrairement aux couples Sterculia tragacantha / Laportea aestuans et Phaulopsis falcisepala / Sterculia tragacantha pour lesquels il faut respectivement 231,40 kg et 503,87 kg pour produire un kilogramme d’escargot. En outre, les couples Sterculia tragacantha / Cassia siamea et Sterculia tragacantha / Clerodendrum paniculatum présentent-ils les meilleurs rendements écologiques de croissance.
La composition biochimique des six plantes les mieux consommées par Limicolaria flammea (Müller) montre que ces végétaux contiennent plus de 70% d'eau et moins de 5% de sels minéraux (tableau 3).
Tableau 3. Composition biochimique des végétaux sauvages par Limicolaria flammea (Müller 1774) |
|||||||||||
Feuilles de : |
Eau, % |
Matière sèche, % |
Matières grasses, % |
Protéines brutes, % |
Cellulose brute, % |
Extractifs non azotés, % |
Cendres, % |
Ca, % |
P, % |
Na, % |
K, % |
Laportea aestuans |
85,42 |
11,01 |
1,32 |
1,01 |
1,44 |
2,78 |
4,46 |
0,46 |
0,34 |
1,08 |
0,02 |
Palisota hirsuta |
84,17 |
10,26 |
0,84 |
2,14 |
0,82 |
4,86 |
1,60 |
0,21 |
0,11 |
1,01 |
1,15 |
Phaulopsis falcisepala |
77,24 |
17,24 |
1,12 |
3,27 |
2,05 |
7,88 |
4,60 |
0,76 |
0,10 |
1,06 |
0,16 |
Clerodendrum paniculatum |
80,30 |
12,32 |
0,67 |
2,31 |
0,66 |
7,18 |
1,50 |
0,19 |
0,22 |
2,04 |
0,32 |
Cassia siamea |
72,90 |
47,10 |
3,98 |
7,01 |
12,23 |
20,50 |
3,39 |
0,91 |
0,08 |
0,01 |
0,27 |
Sterculia tragacantha |
70,75 |
10,34 |
1,00 |
1,82 |
1,01 |
4,91 |
1,60 |
0,26 |
0,14 |
1,06 |
0,10 |
Ces expériences ont permis de remarquer que toutes les espèces végétales proposées à l’escargot Limicolaria flammea (Müller) ont été consommées. L’escargot est essentiellement végétarien et recherche particulièrement les plantes jeunes et tendres (Rousselet 1979). En effet, les Achatinidae se nourrissent dans un spectre très varié de végétaux sauvages et cultivés (Hodasi 1979). En milieu naturel, Limicolaria flammea (Müller) est essentiellement observé autour des habitations et dans les parties de forêts présentant des traces d’activités humaines (Raut et Barker 2002). Ainsi, mesure-t-on aisément ses ravages sur les cultures et particulièrement sur la végétation de la basse strate. Des observations similaires ont été faites chez Achatina achatina (Linné) qui affectionne les feuilles de Cecropia peltata, de Laportea aestuans, de Palisota hirsuta et de Phaulopsis falcisepala (Otchoumou et al 2005 b). La consommation d’un végétal semble liée à son apport nutritif. Aussi, les différences observées au niveau des quantités ingérées de chaque espèce végétale pourraient-elles s’expliquer par des différences de textures, de parfum et de saveur de l’aliment, éléments qui concourent à une bonne consommation (Gallois et Daguzan 1989).
Les expériences de préférences alimentaires révèlent que Limicolaria flammea (Müller) sait effectivement marquer sa préférence parmi les aliments qui lui sont proposés. Ainsi, deux composantes distinctes du preferendum alimentaire peuvent être reconnues (Nicotri 1980): l’une relative à la sélection d’un potentiel de végétaux susceptibles d’être consommés (il s’agit de l’attraction). L’autre concerne le taux d’ingestion de cet aliment (c’est la comestibilité). La comestibilité reflète à la fois la vitesse avec laquelle un aliment donné satisfait les besoins physiologiques du sujet et la facilité avec laquelle cet aliment peut être avalé et ingéré (Watson et Norton 1985). Quant à l’attraction, elle comprend un certain nombre de facteurs incluant la capacité de l’herbivore à détecter les odeurs et d’autres caractéristiques qui déterminent la valeur des végétaux.
Les niveaux d’ingestion observés chez Limicolaria flammea (Müller) semblent dépendre de l’appétibilité de l’aliment. En effet, cette appétibilité s’explique par la relative richesse des aliments en protéines et en matières grasses. Ces dernières sont dites palatogènes en ce sens qu’elles favorisent la palatabilité des aliments. En outre, la cellulose brute et les extractifs non azotés, assimilables à des glucides, jouent un rôle primordial dans le transit intestinal et dans le processus de production énergétique aux côtés des matières grasses. Par ailleurs, la composition biochimique des plantes les mieux consommées révèle qu’elles contiennent chacune plus de 70% d’eau; ce qui s’accorde avec les résultats de Otchoumou (1991). Dans son milieu naturel, Limicolaria flammea (Müller) en tant que végétarien, trouve la plus grande partie de l’eau nécessaire à son hydratation dans les fourrages verts qu’il consomme. C’est donc à juste titre que ces plantes préférées contiennent suffisamment d’eau. L’analyse minérale des plantes indique la présence de calcium, de phosphore, de sodium et de potassium qui sont des macro éléments indispensables à l’activité cellulaire et au bon fonctionnement de l’organisme. Bien que leur présence atteste de la qualité minérale de l’aliment pour l’escargot, leurs teneurs demeurent insuffisantes quant à leur influence sur l’appétibilité de l’aliment et à leur apport à l’organisme de l’animal. Quant aux raisons conditionnant le choix d’un aliment par rapport à sa composition en sels minéraux, il s’agit d’un ensemble de paramètres aux interrelations complexes (Otchoumou et al 2005 b). Croll et Chase (1977) ont mis en évidence l’aptitude d’Achatina fulica (Bowdich) à mémoriser un aliment à long terme.
D’autres facteurs comme l’effet de végétation, les interactions au sein d’une même population, notamment par le biais des traces de mucus (Dan et Bailey 1982), la capacité de percevoir une odeur et de remonter ses effluves jusqu’à l’origine chez les escargots (Farkas et Shorey 1976) interviendraient également sur l’activité nutritionnelle de l’escargot. Toutefois, le preferendum constaté n’implique pas que les végétaux concernés soient de meilleurs aliments pour la croissance et la reproduction, ni qu’ils soient ingérés en plus grande quantité. Au regard des quantités d’aliments quotidiennement ingérées, l’on peut dire que Limicolaria flammea (Müller) préfère Sterculia tragacantha et Cassia siamea. L’indice de transformation montre que le couple Sterculia tragacantha / Cassia siamea est le meilleur aliment (il en faut 28,71 kg pour produire 1 kg d’escargot)
L’étude du comportement alimentaire de Limicolaria flammea (Müller) nous permet de savoir que cette espèce consomme expérimentalement une gamme variée de plantes sauvages et affectionne celles riches en eau. Les aliments préférés ne sont pas forcément riches en éléments minéraux ou ingérés en plus grande quantité. L’aliment étant un élément déterminant dans la distribution des êtres vivants au sein des écosystèmes, il ressort que Limicolaria flammea (Müller) fréquente les milieux influencés par les activités humaines, en raison de leur relative richesse en espèces végétales qu’il affectionne. Le meilleur aliment du point de vue de l’indice de transformation et de la composition biochimique est le couple Sterculia tragacantha / Cassia siamea.
Cates R G and Orians GH 1975 Successional status and the palatability of plants to generaliged herbivores. Ecology 56: 410-418
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Gallois L et Daguzan J 1989 Recherches écophysiologiques sur le régime alimentaire de l’escargot petit-gris (Helix aspersa Müller) (Mollusque Gastéropode Pulmoné Stylomatophore). Haliotis 19: 77-86
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Received 8 January 2008; Accepted 5 April 2008; Published 5 December 2008