Livestock Research for Rural Development 20 (11) 2008 | Guide for preparation of papers | LRRD News | Citation of this paper |
Une substitution d’une vaccination classique de poulets de chair par une vaccination à base de fientes a été effectuée. Deux cent poussins de souche ISA 15, répartis équitablement en deux lots ont été utilisés pour les besoins de l’expérimentation. Ils étaient logés dans un bâtiment avicole et recevaient quotidiennement un aliment classique (poulet de chair) contenant des antibiotiques et des antimicrobiens à objectif zootechnique pour le lot témoin et exempt de ces derniers pour le lot expérimental. Parallèlement, ce dernier a été saupoudré par des fientes, issues d’animaux présentant une infestation par la coccidiose, comme technique de vaccination «naturelle», tandis que le lot témoin a été vacciné selon le protocole national officiel. Les mesures relatives à l'ingestion et le poids des animaux au cours de la phase d’élevage ont été collectées parallèlement à l’estimation du taux de mortalité et la mesure des poids des foies et des bourses de Fabricius (important organe immunitaire) après autopsie effectuée.
Les poids moyens des poulets au cours de la phase d'élevage pour le lot témoin et le lot expérimental étaient de 1,04 Kg et 1,05 Kg (P > 0,05). L’indice de consommation et le taux de mortalité du lot vacciné par les fientes n’étaient pas différents significativement (P > 0,05) de ceux du lot témoin. De même il n'y a pas eu de différence significative entre les poids des foies et ceux des bourses de Fabricius des deux lots (P > 0,05).
La vaccination par les fientes a permis de stimuler l’immunité des poussins et peut donc substituer la vaccination classique dans les élevages avicoles, de même que ces derniers peuvent se passer d’antibiotiques et d’antimicrobiens à objectif zootechnique sans compromettre les performances de production.
Mots clés: antibiotiques, anticoccidiens, aviculture, fientes, vaccination
The average weights of chickens during the experimental period for the control and experimental groups were 1,04 kg and 1,05 kg (P > 0,05). Feed conversion ratio and death rate of the group vaccinated by droppings were not different significantly (P > 0, 05) from those of the experimental group. Also, there was not a significant difference between the weights of the livers and those of the Fabricius bursals of the two groups (P > 0,05).
Vaccination by the droppings stimulated the immunity of chickens and can thus substitute traditional vaccination in the poultry farms, just as these latter can avoid antibiotics and antimicrobics for zootechnical objective without affecting production performances.
Key words: antibiotics, antimicrobics, poultry farming, droppings, vaccination
L'agriculture biologique est considérée par de nombreux consommateurs comme une valeur refuge, un retour à un paradis agricole perdu plus sain et plus authentique. Longtemps prisé par une frange d’adeptes convaincus, le bio progresse de plus de 20 % par an depuis le milieu des années 1990. Il séduit un public de consommateurs de plus en plus large à la recherche d’une alimentation « moindre risque, zéro résidu »
Depuis quelques années les questions nutritionnelles où les effets des pratiques culturales biologiques sur la santé des agriculteurs ont pris le devant de la scène. On a supposé que les antimicrobiens incorporés en doses sous thérapeutiques dans la nourriture des animaux destinés à l’alimentation devaient susciter la résistance antimicrobienne en médecine humaine à cause de l’émergence, dans l’organisme animal, de bactéries résistantes. Ces dernières seraient transmises aux humains, pouvant causer des maladies graves et difficiles à traiter à cause de la résistance antimicrobienne. Les scientifiques font des recherches depuis trente ans déjà dans le but de vérifier la prémisse d’un lien direct et concluent que le rapport de cause à effets ne peut être ni prouvé ni réfuté.
C’est à partir de ce problème que découle l’objectif de cet essai qui vise à :
Ø Produire une viande blanche biologique en se passant surtout d’antimicrobiens ;
Ø Supprimer ou réduire l’utilisation des vaccins dans les élevages avicoles en utilisant une technique de vaccination naturelle par saupoudrage de fientes desséchées naturellement.
Deux cent poussins de souche ISA 15, non vaccinés, ont été prélevés aléatoirement d’un couvoir et ont été élevés en mode intensif durant 45 jours dans un bâtiment d’élevage avicole, à ventilation statique et isolés de tout autre élevage.
Ils ont, aléatoirement, été répartis en deux lots de 100 sujets chacun: un lot expérimental (LE) et un autre témoin (LT). Chaque lot recevant quotidiennement un aliment provenant de l’UAB - ONAB (Usine d’Aliment de Bétail-Office National des Aliment du Bétail). Les deux aliments ne différaient que par la présence ou l’absence d’antibiotiques et d’antimicrobiens. En effet, celui du lot expérimental en était dépourvu alors que celui du lot témoin en contenait. L’eau était disponible à volonté, celle qui était destinée au lot témoin contenait des antibiotiques et des vitamines hydrosolubles alors que celle du lot expérimental était exempte d’antibiotiques.
Le tableau 1 résume le schéma expérimental suivi au cours de cette expérimentation.
Tableau 1. Récapitulatif du schéma expérimental |
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Protocole expérimental |
Lot témoin |
Lot expérimental |
Aliments |
Classique avec ajout de CMV* contenant des antibiotiques et des antimicrobiens |
Classique avec un CMV* dépourvu d’antibiotiques et d’antimicrobiens |
Eau de boisson |
Ad libitum, avec ajout de : -vitamines hydrosolubles; - antibiotiques. |
Ad libitum, avec seulement des vitamines hydrosolubles. |
Plan sanitaire |
En fonction du protocole vaccinal officiel, soit 4 vaccinations. |
4 saupoudrages par des fientes desséchées. |
*CMV : Condiment Minéral Vitaminé |
Les quantités d’aliments offertes et refusées ont été contrôlées quotidiennement par lot afin d’évaluer l’efficacité alimentaire. Les animaux ont été pesés individuellement chaque semaine. A la fin de l’essai, une trentaine de sujets de chaque lot ont été abattus pour autopsie afin de déceler les éventuelles lésions. Les foies ainsi que les bourses de Fabricius ont été pesés à l’aide d’une balance de précision.
Des sections intestinales s’étalant du caecum au cloaque, gardées dans des flacons stérilisés ont été raclées pour en extraire les fientes, ces dernières après homogénéisation, ont fait l’objet d’analyses bactériologiques et parasitologiques. Par la suite, elles ont été réparties dans des boites de Pétri et conservées au congélateur. Les échantillons de l’étude (sections intestinales) ont été pris au hasard sur des poulets de chair dans la chaîne d’abattage.
Les analyses ont été effectuées dans un laboratoire vétérinaire pour la recherche de coccidies, selon le protocole décrit par Marchal et al (1988).
Les sections intestinales ont fait l’objet d’une série de raclages pour en extraire le contenu indispensable à l’essai qui a été conservé au congélateur.
Après le séjour au congélateur, les fientes ont été séchées à l’air libre, dans un endroit propre et isolé.
Les fientes ont été broyées finement puis homogénéisées pour pouvoir parvenir à la muqueuse occulo – nasale.
Les fientes ont été réparties en fractions partagées chacune dans des boites hermétiques dont les couvercles ont été percés de plusieurs trous à la manière d’une poudreuse, permettant le passage des fientes broyées lors de la vaccination.
Mises à part les mesures des poids des bourses de Fabricius et des foies qui ont été réalisées à l’aide du test de Student-Fisher, les autres ont fait l’objet d’une analyse de la variance à deux critères de classification (aliment et vaccination) et ceci à l’aide du logiciel Minitab, version 13.31 fr.
Les échantillons de fientes prélevés ont montré une infestation forte d’ookystes de coccidies.
- Sur les échantillons analysés, il n’y a eu que la présence de bactéries coliformes et ceci après ensemencement sur gélose nutritive ;
- Les examens d’ensemencement sur gélose Hektoen n’ont montré aucune présence de salmonelles ;
- Aussi l’ensemencement sur milieu Chapman n’a pas montré la présence de Staphylocoques.
Les paramètres de croissance mesurés que sont les moyennes des poids aux âges-types (1ère semaine, 2ème semaine, 3ème semaine, 4ème semaine, 5ème semaine et 6ème semaine) des poulets au cours de la période d’élevage sont présentés dans le tableau 2 et la figure 1 montre leur évolution.
Tableau 2. Influence des deux types de vaccination ainsi que la suppression des antibiotiques et antimicrobiens sur certains paramètres des deux lots |
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Paramètres |
Lot témoin |
Lot expérimental |
Signification |
Poids moyens, Kg |
1,04 |
1,05 |
NS |
Indice de consommation |
2,7 |
2,9 |
NS |
Poids des Foies, g |
54,7 |
71,9 |
NS |
Poids des bourses de Fabricius, g |
3,78 |
4,01 |
NS |
Taux de mortalité, % |
4 |
2 |
NS |
NS: Non significatif |
L’analyse statistique n’a révélé aucune différence significative entre les poids des deux lots au seuil de probabilité P= 5% durant la période d’élevage, ce qui signifie que l’incorporation d’antibiotiques et d’anticoccidiens, considérés ayant le même mode d’action qu’un facteur de croissance en terme d’effet bénéfique sur la flore microbienne intestinale, n’a pas influencé la croissance des animaux du lot expérimental et ce, contrairement à ce qui a été rapporté par la bibliographie qui stipule que les antibiotiques et les anticoccidiens sont utilisés comme additifs alimentaires car ils permettent par cette voie alimentaire d’administration une amélioration de la croissance des animaux.
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De même, cette suppression d’additifs a permis une homogénéité des lots de poulets, probablement à cause des bonnes conditions d’élevage. Ainsi, tel qu’indique la situation, il serait possible sous certaines conditions d’élevage d’éliminer les antibiotiques comme additifs alimentaires en alimentation avicole.
Dans un aliment pour poulet de chair, on retrouve systématiquement l’utilisation d’un anticoccidien. Le tube digestif du poulet héberge plusieurs espèces parasitaires, comme les protozoaires et les métazoaires et par leur cycle de développement, il peut se produire une infestation lourde de Coccidies. Ainsi, pour empêcher cette infestation qui engendre une baisse des performances zootechniques, un anticoccidien est utilisé de manière préventive dans l’aliment. Dans l’essai qui a été mené, aucun problème de coccidiose n’est apparu chez le lot expérimental dont l’aliment était exempt d’anticoccidiens. Cette situation serait, peut être imputable en partie, en plus des bonnes conditions hygiéniques, à un développement d’une immunité face aux coccidies, cette immunité a été développée grâce la vaccination par les fientes qui avaient révélé une forte infestation de coccidies.
Les résultats ayant trait à ces deux paramètres figurent dans le tableau 2. Le calcul statistique n’a montré aucune différence significative entre les taux de mortalité et les indices de consommation des deux lots au seuil de probabilité P= 5% durant la période d’élevage.
De même que leur effet sur la croissance animale, les antibiotiques et les anticoccidiens sont connus pour améliorer l’indice de consommation, leur suppression n’a pas non plus influencé statistiquement l’efficacité alimentaire.
L’expérience menée a prouvé que les deux régimes alimentaires, de même que les deux modes de vaccination n’ont pas influencé ces deux paramètres.
La bourse de Fabricius est un organe immunitaire qui joue un rôle primordial dans l’immunité des oiseaux (Toivanen et al 1987 in Sellaoui et al 2005). C’est de son état physiologique que dépendra le statut immunitaire des volailles surtout au début du développement pondéral des poussins. Les différentes agressions de l’environnement (stress, mauvaise hygiène, vaccination, troubles de santé.) subies par les oiseaux, influent sur le développement anatomique et physiologique de la bourse de Fabricius (Siegvel 1990 in Sellaoui et al 2005). Ceci par conséquent peut entraîner une immunodépression chez certains sujets. Pour exprimer tout leur potentiel génétique, les volailles doivent être maintenues en parfaite santé, et particulièrement sur le plan immunitaire. Ce dernier n’a pas été affecté par l’absence des anticoccidiens et des antibiotiques chez le lot expérimental puisqu’aucune différence significative entre les poids des bourses de Fabricius des poulets des deux lots n’a été décelée au seuil de probabilité P= 5% (Tableau 2).
Concernant le métabolisme des lipides, rappelons que chez les oiseaux, à la différence de nombreuses espèces mammifères, la synthèse des lipides est essentiellement hépatique (O'Hea et Leveille 1969, Saadoun et Leclercq 1987, Griffin et al 1992), les tissus adipeux étant surtout des tissus de stockage, il n’y a eu aucune différence entre les poids des foies des poulets des deux lots au seuil de probabilité P= 5% (Tableau 2).
L’examen nécropsique n’a révélé rien d’anormal pour les deux lots sauf la présence d’une entérite subaiguë diffuse hypertrophiante.
Néanmoins les principales différences entre les deux lots sont les suivantes :
1. Graisse abdominale et sous cutanée plus importante chez le lot témoin ;
2. Foie plus volumineux chez le lot témoin ;
3. Les muscles pectoraux sont plus importants chez le lot expérimental que chez le lot témoin.
Les résultats obtenus semblent prometteurs. Il a été démontré statistiquement qu’il n’y avait aucune différence entre les paramètres zootechniques des deux lots. Ceci indique que cette technique de vaccination par les fientes, sans pour autant être sûre à 100 % présente des avantages qui peuvent se révéler très intéressants.
En effet, il peut être possible, dans de bonnes conditions hygiéniques et par un suivi régulier et consciencieux de l’élevage, de se passer ou de réduire considérablement l’usage des antibiotiques. Ceci d’autant plus que le problème de la sécurité alimentaire fait débat et qu’en Algérie, l’automédication avicole faisant appel aux antibiotiques de n’importe quelle famille et de n’importe quelle génération est chose fortement répandue, de même que les retraits de ces additifs quelques jours avant l’abattage des poulets afin d’éviter la présence de résidus, ne sont pas respectés.
Quant aux anticoccidiens, avec ou sans leur présence, nous avons observé des entérites. Cela suffit-il cependant à affirmer que ces souches améliorées ont développé une résistance aux coccidioses ? Seuls d’autres travaux pourront apporter une réponse.
Au terme de cet essai fait à petite échelle, nous proposons de le généraliser à grande échelle dans le but de laisser les poulets développer leur propre résistance face au problème de l’anti bio résistance en réduisant ou en supprimant les anticoccidiens et antibiotiques et ceci afin de
réduire le coût de ces derniers ainsi que ceux des vaccins utilisés en productions avicoles et surtout, en finalité, produire une viande biologique.
Griffin H D, Guo K, Windsor D and Butterwith S C 1992 Adipose tissue lipogenesis and fat deposition in leaner broiler chickens. The Journal of Nutrition 122: 363-368 http://jn.nutrition.org/cgi/reprint/122/2/363
Marchal N, Bourdon J L et Bimet F 1988 Le laboratoire de bactériologie médicale. Doin éditeurs, nouvelle édition- Paris. Pp: 19-23
O'Hea E K and Leveille G A 1969 Lipid biosynthesis and transport in the domestic chick (Gallus domesticus). Comparative Biochemistry and Physiology 30: 149-159
Saadoun A and Leclercq B 1987 In vivo lipogenesis of genetically lean and fat chickens : effects of nutritional state and dietary fat. The Journal of Nutrition 117: 428-435 http://jn.nutrition.org/cgi/reprint/117/3/428
Sellaoui S, Alloui N et Djaaba S 2005 Etude morphométrique et anatomopathologique de la bourse de Fabricius du poulet de chair. Sixièmes Journées de la Recherche Avicole, St Malo, France, 30 et 31 mars. pp 433-437 http://www.journees-de-la-recherche.org/JRA/Contenu/Archives/6_JRA/pathologie/P15-ALLOUI-CD.pdf
Received 15 February 2008; Accepted 27 March 2008; Published 6 November 2008